Avec un peu de retard, je reviens sur notre voyage au Fidji.
Après Savusavu, notre balade au Vanua Levu s’est prolongée vers l’est (Fawn harbour & Nasasabu), avec
toujours la mer pour nous seuls. Pas le moindre voilier ou bateau de pêche à
l’horizon. A nous les mouillages
sauvages, les criques tranquilles, les trous secrets dans la mangrove.
Arrivée à la passe de Fawn Harbour |
Le mouillage on ne peut plus abrité de Nasasabu |
Sabay Dii dans le lagon de Fawn Harbour |
Sabay Dii vu d'un des rares trous dans la mangrove qui permettent de débarquer à terre |
Fawn Harbour vu depuis le platier |
Le hameau de Fawn Harbour (une dizaine de maisons et une vache) |
A Fawn Harbour, nous avons fait notre premier sevusevu.
Eh oui, autre pays, autres mœurs. Les Fidji sont un pays
très traditionalistes, et très structuré administrativement. Dans chaque
village, il y a un chef, plus ou moins élu car ici comme aux Tonga, ou à
Wallis, il faut être né de bonne famille pour avoir le privilège de certaines
responsabilités. Bref, il y a un chef à qui tout étranger doit aller demander
l’autorisation d’entrer dans le territoire du village, le droit de se baigner
dans la mer bordant le village, le droit d’emprunter les chemins et routes
traversant la commune, le droit de pêcher , etc. Assez surréaliste pour un
européen, mais tous les documents officiels ainsi que les récits de navigateurs
disent bien qu’il ne faut pas passer outre cette obligation, car cela serait à
tout coup considéré comme une véritable offense par tout le village. Et cette
demande d’autorisation doit être faite selon les règles au cours d’une véritable
cérémonie initiatique, le fameux sevusevu !
Voilà la démarche à suivre …
Etape préliminaire : avoir acheté dans un des marchés
de la région un bouquet de kava, une racine que l’on fait infuser et dont les effets
sont un peu euphorisants en plus de donner des fourmis dans la bouche. C’est la
boisson cérémonielle locale, avec quelques effets indésirables si l’on en prend
beaucoup, ce qui est le cas, car en fait dès que l’on rend visite à quelqu’un,
on a droit à cette potion magique synonyme de boisson de bienvenue. D’où les
velléités des services de santé fidjiens de faire disparaitre cette tradition
qui génère un problème de santé publique. Mais la bataille n’est pas
gagnée !
Etape du premier contact : s’approcher du village, sans
lunettes de soleil et sans couvre-chef, considérés comme des accessoires
irrespectueux, et s’adresser très poliment à la première personne rencontrée
pour lui demander de rencontrer le Chef du village pour le sevusevu.
Etape de l’offre du kawa : le Chef du village une fois
informé peut réunir d’autres personnes d’importance pour la cérémonie à
laquelle on est invité à se rendre. On salue très poliment et on offre le
bouquet. Selon les cas c’est soit ce
bouquet de kava qui va être utilisé pour la préparation (ce qui va demander du
temps), soit la boisson est déjà prête et la cérémonie va pouvoir démarrer
rapidement.
Etape de la de la cérémonie : on se présente et on
répond aux questions, puis le Chef du village tape dans ses mains en faisant un
bruit spécial et il commence une harangue qui peut être très longue en langue
traditionnelle. Lorsqu’il a terminé, il refrappe dans ses mains avec les autres
invités, et il vous annonce que vous êtes les bienvenus au village. C’est le
moment de boire à tour de rôle, et cul sec, le kava servi dans une noix de coco
qui passe de main en main.
Voila ce à quoi nous nous attendions, Ba et moi, en
débarquant à Fawn Harbour, avec à la main notre bouquet de kava acheté
préventivement au marché de Savusavu. Mais Fawn Harbour n’est qu’un minuscule
hameau de la commune adventiste de Bagasau distante de quelques kilomètres.
C’est là que nous nous rendrons donc pour le sevusevu. Nous rencontrerons le Chef du village et tout se déroulera comme prévu sauf que chez les adventistes, on ne boit pas de kava que l’on considère comme une drogue au même titre que l’alcool ou le tabac. Notre cadeau sera quand même pris avec remerciements et nous aurons droit à la tirade inintelligible de bienvenue dans la maison du Chef du village, en toute intimité.
La maison du Chef du village |
Le bureau de poste-banque-etc. Pas sûr qu'il ouvre plus d'n jour par semaine. |
Les formalités traditionnelles étant satisfaites, nous
pourrons donc circuler librement et profiter de tout les bons côtés de ce minuscule
village de Vanua Levu, à savoir une source chaude délicieuse où nous conduira
Mickael, le pasteur du village,
et un immense platier où je vais attraper un gros poulpe d’une dizaine de kilos, à la mahoraise, c'est-à-dire à mains nues, et où nous découvrirons un nouveau coquillage délicieux que nous ramasserons en abondance pour nous en empiffrer les jours suivants.
Petite murène |
Attention, serpent de mer venimeux |
Voila ce qui reste d'un poulpe de plaus de 10 kg après préparation et cuisson |
Coquillages excellents |
Après deux jours passés à Fawn Harbour, nous nous rendrons à Nasasabu, la commune voisine, mais dont le mouillage perdu en pleine mangrove est tellement éloigné du centre du village que nous n’aurons pas à faire un nouveau sevusevu. Et il va en être ainsi pendant tout le reste de notre voyage, car, soit nous serons dans des mouillages complètement perdus dans la nature, loin de toute agglomération, soit nous serons près de gros bourgs où la vie moderne a rendu ce genre de cérémonie inadapté voire désuet.
Ainsi, nous nous retrouverons avec cinq bouquets de kava sur
les bras au moment de quitter les Fidji.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire