Bienvenu sur le site de Sabay Dii

En laotien, Sabay Dii signifie "bonjour", "salut", "ça va"...
Dans la pratique, cette expression est utilisée chaque fois qu'on est heureux de rencontrer quelqu'un.
Pas étonnant que j'ai baptisé mon bateau "Sabay Dii", non ?

jeudi 19 mars 2020

Bateau fin prêt, mais changement de programme pour cause de confinement


Je vous avais annoncé la présentation prochaine du programme annuel de navigation de Sabay Dii pour la saison 2020 en Turquie. C’était sans compter sur l’extension de la pandémie du Covid-19 jusqu’ici. Les autorités turques n’ont pas tergiversé comme les françaises, et avant le premier décès enregistré, la Turquie a fermé toutes ses frontières, très hermétiquement, le 14 mars, soit moins d'une semaine après mon arrivée. Plus aucun vol pour la France, probablement pour de nombreux mois.
Mais ce n’est pas tout ; pour enrayer le développement de l’épidémie sur le territoire, juste une semaine après que je sois arrivé, les autorités turques ont décrété toute une série de mesures :
• à partir du 16 mars, la fermeture des universités et des établissements scolaires ;
• la tenue sans public des événements sportifs ;
• la fermeture de toutes les salles de spectacle, bars, cafés traditionnels, bar à chichas, cafés internet, salles de jeux, aires de jeux (en milieu fermé) pour enfants ainsi que des salles de sports et des piscines. Même les lieux de prière sont concernés. Les restaurants et cafés où l’on joue de la musique sont également fermés. Les restaurants et les pâtisseries peuvent maintenir leur activité mais uniquement pour de la vente à emporter ou des livraisons à domicile.




Quelques images de la zone commerciale la plus active d'Antalya, prises juste après la publication des décrets de réduction des activités économiques



Les grands boulevards
L'autoroute littorale du Sud de la Turquie
Juste après la fermeture des lieux publics ou de consommation non indispensables, sentant le confinement imminent, j'ai pris le bus pour aller faire quelques achats importants (thermomètre, quelques médicaments, des fruits et légumes).
Je ne suis pas sorti tout nu, non !
Les transports en commun fonctionnaient encore, mais pratiquement vides
En ville, au moins la moitié des gens portaient un masque. Policiers, vendeurs (même les mamies venues de leur campagne pour vendre leur production maraîchère), caissières, chauffeurs de bus, tous étaient parfaitement équipés. Encore une bonne leçon à prendre, pour nous les tout petits français !
Dans les superettes, tous les produits frais étaient préemballés, de façon à ce qu'il n'y ait aucun contact physique entre les produits et les personnes présentes dans le magasin. Désinfection des caisses après chaque passage.
























Autre décision qui me concerne tout particulièrement, à compter du 22 mars : le confinement absolu des personnes âgées de 65 ans et au-delà, ainsi que les personnes souffrant de maladies chroniques (cardiaques et pulmonaires notamment).
Conséquence : j’ai interdiction absolue de sortir. Pas question d’aller faire mes courses, d’aller retirer de l’argent, d’aller dans une pharmacie, etc. Je dois rester sur Sabay Dii, probablement pour de nombreux mois, en comptant sur le personnel de la marina pour me ravitailler uniquement en denrées fraîches, pour le moment, car j’avais pris la précaution de remplir mes soutes dès mon arrivée.
On vient me livrer pommes oranges et bananes
Je pensais pouvoir contourner l’interdiction en partant avec le bateau (en naviguant, je reste chez moi) pour aller m’installer quelques temps dans une crique isolée, mais ce n’est pas possible, non plus. J’ai été informé que les Garde-Côtes étaient chargés de m’interdire toute navigation (je suis le seul voilier étranger de toute la région maritime, et les Garde-Côtes sont juste à l’entrée de la marina). On m’a même prévenu de ce que j’encourrais en cas de non-observation de la loi : environ 500 € d’amende, mise en quarantaine, avant un retour forcé sur mon bateau si je ne suis pas positif, (sauf si mon bateau était mis sous séquestre, ce qui pourrait arriver).
Vous l’aurez compris, il n’est plus question de naviguer d’ici l’été, au plus tôt, car l’épidémie a un bon mois de retard sur la France. Et comme il est impossible de rentrer en France, l’Ambassade ne pouvant rien faire pour les français coincés ici, je vais devoir prendre mon mal en patience.
Quelques mois dans une belle vie, ce n’est pas si terrible. D’autant que, à défaut de télévision ou radio, et sans Internet haut débit (à peine 4Go pour le mois jusqu’à épuisement de mon crédit téléphonique), j’ai sur Sabay Dii de la bonne musique, de bons livres, et surtout une redoutable aptitude à jouer avec le temps qui passe. C’est donc avec un moral à toute épreuve que j’ai commencé depuis une semaine mon confinement dans les 12 m² de mon cosy petit bateau.
Ne vous bilez pas pour moi, car je suis tellement isolé que même le virus n’a aucune chance d’arriver à me trouver. Bien fait pour ce saligaud ! De votre côté, prudence absolue, aussi.
Et rendez-vous cet automne, j’espère.

Confiné en France ou confiné aux confins ..., de gré ou de force

Ah mes amis !

Je vous sais confinés à cause de cette saloperie de SARS-CoV-2, et je pense bien à vous, d'autant que votre camisole de force n'est pas prête de s'évanouir. Plusieurs mois sans aucun doute possible.

Je pense bien sûr aux miens qui sont coincés chez eux, qui télé-travaillent peut-être, mais je pense aussi à ceux que je ne connais pas et qui sont enfermés à 5 ou plus dans un 2 ou 3 pièces, insalubre, avec vue sur les poubelles des autres immeubles, et encore plus à ceux qui n'ont pas de logis et qui vivent dans la promiscuité mortelle de refuges pour sans-abris.

Je pense tout autant à tous ceux, effroyablement exposés au virus, qui œuvrent avec abnégation pour soigner les malades, aux secouristes réquisitionnés, aux pompiers, ...

Mais ce n'est pas tout. Il y a aussi les obscurs pions de notre société qui travaillent dans l'ombre pour assurer l'approvisionnement des confinés (nourriture, énergie, eau, etc.). Magasiniers, chauffeurs, manutentionnaires, logisticiens, ouvriers de l'industrie discrète qui pourvoie au fonctionnement minimum des services, et aussi les éboueurs, les égoutiers, ceux qui font notre ménage collectif.

Et encore, je pense aux flics qui sont aussi en première ligne pour faire rentrer dans le droit chemin de la prévention collective tous ces "cons finis" (et pas confinés) qui traînent dehors en se croyant immortels et en se foutant pas mal des autres.

Et toutes ces personnes bossent sans aucun protection, la plupart du temps, à cause de l'imprévoyance criminelle de nos dirigeants (les politiques, les experts en tout genre, les administrateurs de haut rang) qui au lieu d'imaginer le pire (c’est-à-dire ce qui peut arriver et finit un jour ou l’autre par arriver), se vantaient d'avoir préparé la France mieux que tous les autres. Depuis deux mois, faute d'avoir prévu, ils réagissent, c'est-à-dire qu'ils fonctionnent toujours en retard sur le désastre. Ça me fait penser à la préparation imbécile des grands généraux et maréchaux français qui ont été à l'origine de la débandade de nos armées en 14, en 40, en Indochine, et qui avaient soit-disant tout prévu. Ça me fait penser surtout à Tchernobyl et au gouvernement soviétique qui a envoyé à la mort, sciemment, des milliers de personnes, en les flattant d'être des héros. Je ne serais pas surpris que tous ces travailleurs forcés d’aujourd’hui en France, demandent des comptes le moment venu, du moins ceux qui ne seront pas passés à la trappe. Je ne serais pas surpris non plus que nos dirigeants reprennent leur langue de bois, en promettant une grande réflexion collective, mais en ne distribuant au bout du compte que des pensions aux veuves et orphelins.

Notre société est profondément inégalitaire, et dans les pires situations, elle le devient encore plus. Les nantis d’hier sont les mieux protégés dans leur bel appartement, leur villa avec jardin, ou leur résidence secondaire, loin des pénuries, du besoin, de l’ennui. Les moins bien lotis en temps normal constituent la masse des victimes. Et puis, il y a les « liquidateurs » (en référence à Tchernobyl) qui se dévouent corps et âme pour sauver leur pays et leurs concitoyens, les héros qui servent de chair à canon en temps de guerre, et aujourd’hui, tous ceux de la première ligne qui sont sacrifiés par nos dirigeants imprévoyants, prétentieux, et donneurs de leçons.

Mais, est-il possible aujourd’hui de sortir, collectivement et volontairement, des bras tentaculaires de cette pieuvre qu'est la société de consommation mondialisée, conçue pour repousser comme la queue du lézard, lorsqu'elle est coupée ?

Par ma naissance, donc par chance, j’ai toujours fait partie des nantis et j’en ai toujours été conscient. En classe de terminale, j’avais décidé de faire agronomie pour vouer mon existence aux peuples démunis en leur apprenant à profiter au mieux de ce que la terre nous offre. La rancune sournoise de ma prof de physique de l'époque a fait que je n’ai pu faire la classe préparatoire pour entrer à Agro, mais m’a fait découvrir, assez tardivement, pas la même occasion, à quel point j’étais doué pour les sciences. D’où ma carrière de physicien, matheux, didacticien, etc. Une vie professionnelle passionnante et une existence de nanti, encore, qui m’ont permis de mener parallèlement au boulot une vie de bourlingueur. L’occasion répétée de piqûres de rappel pour que je n’oublie pas à quel point j’étais privilégié.

Et me voilà aujourd’hui, par un hasard de calendrier, au comble du privilège …
  • Parti en Turquie juste une semaine avant le confinement de la France (mon billet d’avion avait été pris avant l’apparition du Coronavirus) ;
  • En situation d’isolement presque parfaite, puisque je suis volontairement confiné sur mon voilier, du fait même de la vie de marin ;
  • En totale autonomie, puisque je pourvoie à mes besoins énergétiques et à l’approvisionnement en eau sans dépendre de quiconque ;
  • Reste l’avitaillement que je peux réaliser en ce moment pour une survie en totale autonomie de plusieurs mois dans un pays qui n’est pas encore trop contaminé par le Covir-19

Si j’étais mesquin (et donc je le suis), je dirais que je ne dispose que de 12 m², que mon confort est des plus spartiates, qu’il fait en ce moment moins de 10°C le matin quand je me lève, que je n’ai ni télé, ni radio, ni d’autre moyen de communication qu’un téléphone, avec 2Go par mois (juste de quoi prendre et donner des nouvelles à la famille et aux copains). Je dirais aussi que lorsque le virus qui arrive en ce moment ici (aujourd'hui 98 cas et un seul décès) se déploiera, je n’aurai aucun moyen de quitter la Turquie qui a supprimé toutes les liaisons avec les France et qui sera tout aussi isolée du Monde lorsqu’elle sera infestée. Donc de nombreux mois coincé ici en perspective !

Si j’étais malhonnête (mais je ne le suis pas complètement), je dirais que finalement je ne suis pas mieux loti que vous sur mon cher Sabay Dii, car, comme vous, je n’ai pas le droit à l’erreur, qui pourrait bien m’être fatale, de contracter le virus, vu mon système immunitaire affaibli par des années de staphylocoque doré, et vu le système de santé turc. Mais je ne le pense pas, car, à la différence de vous, ma vie de confiné relève d’un choix ancien et correspondant parfaitement à ma mentalité de solitaire. La seule différence, minime entre hier et aujourd’hui, c’est que quand j’irai faire mes courses, une fois tous les quinze jours, je mettrai un masque. Oui, oui ! J’ai des masques, plus qu’il ne m’en faut, car j’en ai acheté tout un stock (des FFP2 avec ou sans valve et même des FFP3) pour les envoyer en France, mais une heure après l’achat, toute expédition de ce genre d’objet est devenue interdite et impossible.

Mon seul problème du moment (à part les pieds et le bout du nez gelés) est de savoir que, injustement, je me retrouve une fois de plus dans une situation de privilégié, sans l’avoir cherchée, et que bien que me sentant redevable de ce privilège, je n’ai rien à offrir, pas même des masques, sauf de la compassion.

Alors je pense à vous, pour me réchauffer au moins le cœur.

jeudi 12 mars 2020

De retour sur Sabay Dii, à l'heure du coronavirus

Je suis arrivé à Antalya, où était hiverné le bateau, dans la nuit du samedi 7 au dimanche 8 mars 2020, après un voyage en avion depuis Barcelone, via Istanbul, sans problème, si ce n'est ce satané Covid19. Au départ de Perpignan que je quittais en bus pour rejoindre l'aéroport de Barcelone, personne n'avait de masque de protection, mais arrivé en Espagne, le port du masqué semblait généralisé. Différence symptomatique entre deux pays voisins. D'un côté de la frontière, l'Espagne, on se méfiait du virus et on tentait de s'en protéger en allant acheter des masques FFP2 disponibles un peu partout. De l'autre côté, en France, on se laissait bercer par les propos lénifiants des autorités qui affirmaient que l'on ne risquait pas plus qu'une mauvaise grippe, et que les masques ne servaient à rien. Toujours cette manie franchouillarde de se croire plus malin que les autres, et notamment que ces pauvres italiens qui avec leur comportement latin excentrique s'affolaient pour rien alors que nous contrôlions la situation. Un contrôle assez surréaliste quand on sait que pendant que nos dirigeants nous débitaient doctement leurs boniments, il n'y avait aucun masque FFP2 disponible chez nous (pas même pour les professions médicales), pas plus que de solution hydroalcoolique. Eh oui ! Aussi incroyable que cela puisse paraître à toute personne un peu sensée, nos responsables n'ont jamais pensé à faire des stocks, en voyant ce qui se passait en Chine. C'est le propre de ces élites hors-sol qui à force de vivre en vase clos, oublient de faire marcher le bon sens ou même de se remémorer de bons vieux proverbes, comme celui qui dit que les mêmes causes ont les mêmes effets. Si le virus faisait de tels dégâts en Chine, puis en Corée, et ensuite en Italie, il était évident qu'il allait aussi faire des ravages en France. Pas besoin d'avoir fait une grande école pour deviner cela. N'étant ni plus malin, ni plus invulnérable que les autres, j'ai aussi mis un masque en arrivant à l'aéroport, car j'avais eu la prudence d'en chercher en pharmacie, bien avant qu'ils soient épuisés. Dans le même ordre d'idée, j'avais dans ma valise un litre de solution désinfectante maison que je m'étais préparée pour apporter au bateau. L'anticipation est une bonne habitude de marin qui sait toujours comment il part en mer, mais ne sait jamais vraiment ce qui pourrait arriver après. J'ai donc voyagé avec masque dans un avion où presque tout le monde était masqué. Un vrai carnaval aérien !

Hors mis cette histoire de coronavirus (les masques, les fiches de renseignements sanitaire dans l'avion, les contrôles de température aux arrivées internationales et des équipes de désinfection en tenue anti-ébola), rien de spécial à signaler entre Perpignan et Antalya.

Arrivé de nuit à la marina, j'ai eu le plaisir de retrouver Sabay Dii exactement comme je l'avais laissé.
Sabay Dii en septembre 2019. Impeccable !
Sabay Dii en mars 2020. Encore impeccable !
(notez le petit point blanc entre les mâts ; c'est la neige sur les montagnes du lointain)

 Faut dire que je l'avais bien préparé pour passer l'hiver en Turquie ...



A la différence de toutes ces années passées sous les tropiques, pas la moindre moisissure à l'intérieur, ce qui représente des dizaines d'heures de nettoyage qui m'étaient épargnées. Le seul hic, c'était qu'il ne faisait que 10°. J'ai donc passé ma première nuit à bord, habillé d'autant de couches qu'un oignon, sans oublier mon bonnet rouge à la Cousteau qui n'était pas sorti de son tiroir depuis le dernier hiver passé en Nouvelle Zélande, en 2015.

Cela fait maintenant presque une semaine que je suis ici, et j'ai déjà pas mal avancé dans la préparation de Sabay Dii, qui après plus de 10 ans en mer, a vraiment très fière allure. Je pourrais presque larguer les amarres, en l'état, mais je vais prendre deux à trois semaines pour tout passer en revue, refaire des vernis et des peintures, ce qui est possible à cette époque car il fait bon en journée (autour de 20°C).

Première étape : remettre tout l'accastillage et tous les cordages qui sont restés bien à l'abri à l'intérieur du bateau
Le casse-tête des passages de cordages au pied de mât.
Mais je fais cela les yeux fermés tellement je l'ai fait de fois.
Je vous parlerais bien du programme de navigation de l'année, mais à cause de cette pandémie, il est difficile de faire des projets. J'avais initialement l'intention de remonter sur Istanbul en me faufilant entre la constellation d'îles turques et grecques de la Mer Égée, contre le vent et le courant, ce qui demande presque deux mois à cause de l'impossibilité de naviguer de nuit, mais il n'est pas sûr qu'en juin, il soit possible à un marin français de débarquer dans cette mégalopole. En effet, deux mois c'est aussi le temps prévisible pour que l'épidémie qui est juste en train d'apparaître en ce moment s'emballe de façon démoniaque. Ne sachant pas lire dans le marc de café pas plus que dans les viscères des poissons, je vais probablement remonter tranquillement en profitant des criques sauvages où je pourrais passer des jours heureux et insouciants pendant que vous subirez les affres du coronavirus, en attendant que la situation sanitaire évolue.

mercredi 4 mars 2020

Ça approche, et ça commence à me démanger

Derniers jours de terrien.
Dernières heures à me faire entraîner à un rythme effréné par le maelstrom de l'agitation ambiante.
Dernières minutes à entendre parler de Coronavirus, d'élections municipales, de 49.3, ...
Mais dernières secondes aussi avec tous ceux qui me sont chers.

Eh oui ! Samedi 7 mars, je repars en Mer pour des mois de navigation côtière en Turquie.

De l'eau et de l'air ; du clapot et des brises.
Des criques sauvages, des îlots cachés.
Loin des marinas, des sites touristiques, des charters et des bateaux de croisière.
Silence et volupté de la solitude qui seule permet de réfléchir sur le Monde et les Autres.
Temps figé, sans turbulence ni même importance.
Espace sans mouvement parasite, sans limite, sans métrique.

Juste la nature et comme seuls compagnons, ses hôtes habituels, rares et discrets : pas mal de tortues et même quelques phoques, peu d'oiseaux marins, presque pas de poissons, et aucun coquillage. C'est peu, très peu, quand je compare ce coin de Méditerranée aux mers et océans traversés par Sabay Dii tout au long de son tour du Monde. Et entre eux et moi, une seule règle simple et tacite : ne pas se déranger mutuellement ! C'est peut-être ça l'Harmonie : penser à tout moment que je ne suis pas seul dans le Milieu tout en faisant tout pour que les Autres qui connaissent ma présence bien avant que je connaisse la leur, puissent continuer à vivre comme si je n'étais pas là. 

Mais la Turquie se rattrape de la pauvreté de ses eaux dans d'autres registres : le minéral, le végétal, sans parler de tous ces somptueux vestiges civilisationnels des peuples de marins, commerçants, et guerriers qui ont colonisé les côtes turques en y laissant ce qu'ils avaient de mieux : leur culture. Au final, une constellation de perles archéologiques s'éparpille dans un écrin de promontoires, de baies, de vallons, dans un cocktail de roches et d'essences d'arbres odorantes qui donne envie de se poser et de laisser son esprit vagabonder en remontant le temps de quelques millénaires. Eh oui ! Contrairement à ce que beaucoup pensent, naviguer, c'est profiter aussi d'un environnement superbement minéral et merveilleusement végétal.

Et puis, il y a les turcs, que j'ai découverts quand à l'âge de 18 ans, j'avais traversé en auto-stop la Turquie, entre Grèce et Syrie, au cours de mon mémorable tour de la Méditerranée. Ils étaient hospitaliers, chaleureux, et modestes. Et ils le sont toujours, ce qui fait que de temps en temps, quand je vais à terre pour faire mon marché, ou pour aller explorer des vestiges, ou pour photographier quelques fleurs et insectes, c'est toujours avec le même plaisir que je m'arrête dans un petit boui-boui  pour échanger des idées, tout en prenant un thé, ou en dégustant leur cuisine si particulière et tellement savoureuse.

Bon ! Vous l'aurez compris, je retourne vers Sabay Dii et la Turquie avec jubilation.