Arrivé à Guaymas

Je viens juste d'arriver à Guaymas, sur la côte continentale ouest du Mexique. C'est ici que j'ai choisi de laisser le bateau au sec, pendant plusieurs mois, le temps que les cyclones aient fini de sévir sur la zone. Partant de Basse Californie, il me fallait donc traverser une nouvelle fois cette extraordinaire Mer de Cortez, mais cette fois-ci d'ouest en est. J'ai fait cela dimanche, toute la journée mais aussi toute la nuit qui a suivi. J'avais élu cette date du dimanche 6 mai 2012 (oh très drôle), car il y avait une belle pleine lune.

Je suis parti au petit matin, quittant la Baya Santo Domingo (dont je vais bientôt vous reparler) où je partageais un beau mouillage et une belle plage avec un ketch américain, mais dont je ne vis jamais les occupants.

Pendant toute la journée, il y eu peu de vent mais beaucoup d'animation dans l'eau : nombreux dauphins venant batifoler à la proue du bateau, énormes baleines dans le lointain et des banc de marsouins de Dalls qui croisaient régulièrement ma route (mais si, vous savez ce que c'est car vous en avez déjà vu à la télé. Ce sont de très gros dauphins sans nez et avec le ventre noir et blanc, un peu comme les orques.

Bref, des ailerons et des souffles un peu partout sur l'eau calme de ce beau dimanche.

 A la tombée du jour, le ciel s'est teint d'un ocre doré magnifique.

 et j'ai même enfin pu faire une photo du fameux rayon vert que nous pouvions voir si souvent à Mayotte

et la nuit est arrivée, mais pas seule...

elle était accompagnée d'une belle lune ronde et pleine comme une déesse primitive.

 Un superbe spectacle de 12 heures non stop, sans le moindre nuage.

Et agrémenté pendant plus d'une heure de calme plat par la symphonie des souffles d'un banc de baleines endormies. C'était probablement des baleines bleues car j'en avait déjà vu plusieurs dans la journée. Il y en avait partout autour du bateau : à bâbord, à tribord, à l'avant et puis derrière. C'était à la fois magique et assez crispant car ces animaux peuvent atteindre 200 tonnes et 35 mètres de long (la longueur de deux autobus mis bout à bout). Un petit coup de queue de l'animal se réveillant par sursaut et c'est le bateau qui explose et coule à pic. Mais heureusement, le vent était à ce moment-là très faible et donc j'allais très lentement et pouvais voir sous la lumière de la lune, leur jet d'eau. Un spectacle que je ne suis pas prêt d'oublier. Pendant ce temps-là, vous deviez être devant vos téléviseurs à attendre fébrilement les résultats de l'élection présidentielle. 

Ensuite le vent s'est levé et la mélodie a changé : c'était le bruissement de l'eau sur la coque de Sabay Dii filant à plus de huit noeuds sur une mer parfaitement plate. A cinq heures du matin, la côte déchiquetée des environs de Guaymas se dessinait en silhouette, sur un bleu profond

Avant que le soleil ne se lève, je passais sous le phare et Guaymas 

 perché sur une falaise abrupte au pied de laquelle les lions de mer se sont mis a hurler à mon passage.

Au moment où le soleil pointait à l'horizon, j'entrais dans la superbe baie de Guaymas

 lisse comme un lac de Champagne au petit matin

 J'étais accompagné de deux gros cargos

et surtout d'une multitude d'oiseaux de mer en quette d'un gros poisson pour le petit déjeuner

 fous bruns en folie collective

 et en solo

pélican en aqua-planing

et des centaines de frégates scrutant la surface de l'eau depuis leur perchoir de cactus blanchis par la fiente.

Et puis, comme seulement cela peut se produire en Mer de Cortez,

le ciel a pris une couleur irréelle dorée

 rendant le cargo aussi magnifique qu'un oiseau marin

Quelques minutes plus tard, le spectacle était terminé.

 J'entrais dans le port,

même pas fatigué par 24 heures de navigation.

Eh oui, quand le spectacle est captivant, on ne voit pas le temps passer.

 De son côté, Sabay Dii en pleine forme aussi, commençait à chercher des noises à son voisin de quai.

Même pas peur, qu'il disait !

Sacré Sabay Dii !