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En laotien, Sabay Dii signifie "bonjour", "salut", "ça va"...
Dans la pratique, cette expression est utilisée chaque fois qu'on est heureux de rencontrer quelqu'un.
Pas étonnant que j'ai baptisé mon bateau "Sabay Dii", non ?

mardi 5 mars 2019

Déception aux Maldives

Le titre de ce message ne laisse pas de doute.
Comme vous allez le voir, alors que depuis longtemps, j'avais envie et prévu de faire un petit arrêt aux Maldives, à Uligamu, un joli atoll réputé depuis bien longtemps comme très hospitalier, et situé tout au Nord de l'archipel des Maldives, exactement sur la route maritime reliant le Sud du Sri Lanka à Djibouti, des évènements imprévisibles vont me pousser à changer complètement mes plans.
Mais nous n'y sommes pas encore ...
En effet, nous sommes le 26 janvier (date historique dans la famille, n'est-ce pas Xavier ?) et venons juste de passer le phare de Dondra, tout au Sud du Sri Lanka ; nous glissons sous spi sur une mer d'huile par 8 nœuds de vent. Moment délicieux pour les voileux !!!


La proximité de la côte (à quelques milles seulement) fait que nous retrouvons de la vie, apparemment absente et en tout cas oubliée depuis notre départ de Thaïlande, dix jours plus tôt …
  • D'abord des tortues, nombreuses, et cela est un bon signe pour la biodiversité.

  • Ensuite des oiseaux de mers, mais aussi des oiseaux terrestres comme celui qui est venu se poser sur le panneau solaire par simple curiosité.

  • Et bien sûr des pêcheurs.
certains sur des caboteurs très classiques
ou sur des barques à moteur


mais la plupart du temps, c'est sur des praos avec des équipages nombreux et des vigies perchées sur des échelles
Inspiré par ces pêcheurs sri-lankais très sympathiques qui s'approchaient de nous pour nous saluer, mais surtout parce que nous avions épuisé le stock de dentées fraîches, je décidais de me mettre moi aussi à pêcher.
Non mais !!!
Mais avant de mettre une ligne à l'eau, il faut choisir son leurre, et ce n'est pas si facile.
Parmi la cinquantaine de spécimens avec lesquels je m'emmêle les pinceaux, je choisis un petit poulpe en plastique flottant, avec quelques filaments roses et brillants, et surtout une tête sifflante, l'arme fatale pour taquiner la dorade coryphène.
et voilà le travail (une semaine de poisson frais d'un seul coup)
Mais la pêche est une chose et la voile en est une autre.
En effet, à peine le phare de Dondra disparaissait de l'horizon que nos difficultés commencèrent, dans la perspective de rejoindre les Maldives.
Car pour naviguer à la voile, il faut un voilier, bien sûr, mais il faut aussi ... DU VENT ! Or la carte météo relevée au passage de la pointe Dondra était très explicite (la correspondance couleur de carte – vitesse du vent est sur le côté droit). 
Pas de vent ou presque (couleur bleue) du Sri Lanka jusqu'aux Maldives .
Et cette fois-ci les services météorologiques ne vont pas se tromper.
En fin d'après-midi, les pêcheurs disparurent, et avec eux le vent
Coucher de soleil, sans vent, au large du Sri Lanka. Quiétude absolue !
Le lendemain matin, couleurs différentes, mais même calmasse !
Un jour plus tard, même ... désolation
Pétole absolue !!!
Comme nous affalions les voiles pendant la nuit pour ne pas qu'elles battent inutilement dans la calmasse, notre trajectoire devenait complètement chaotique, le courant et la dérive l'emportant la nuit sur notre progression à la voile le jour. Bref, cette troisième portion de notre longue traversée commençait mal.
La faute à cet énorme continent indien qui "tue" le vent à son Ouest, jusque très loin.
Il nous fallut attendre qu'Éole se réveillât, ce qui arrive forcément après une grosse sieste de deux jours, même pour un dieu, c'est bien connu depuis l'Antiquité.
Le 29 janvier au matin, petit frémissement de l'océan, puis quelques heures plus tard légère brise, et dans l'après-midi vent respectable et joli clapot. Nous étions repartis vers les Maldives.
Bernard à la barre, ce qui est très rare car nous avons un pilote automatique qui barre aussi bien que nous et qui est infatigable. Mais après trois jours à glander, il fallait bien que mon formidable équipier s'occupât un peu, non ?
Au vent arrière, voiles d'avant "en ciseaux", c'est-à-dire génois d'un côté et trinquette de l'autre,
sans grand voile, puisque le vent vient de derrière

Le 1er février au petit matin, soit trois jours plus tard, les Maldives étaient enfin en vue.
Terre à bâbord
Terre à tribord. C'est Uligamu
Uligamu est l'un des nombreux îlots constituant de manière discontinue, la barrière du grand atoll de Ihavandhippolhu

Nous contournons Uligamu par le Sud en admirant ses eaux turquoise et la verdoyante frondaison de ses palmiers et cocotiers.
Le Sud de Uligamu
Après près de deux semaines de navigation non-stop, il nous tarde de nous jeter à l'eau, mais aussi et surtout de débarquer sur l'île pour acheter des fruits et légumes frais (notre réserve était calculée pour cette échéance), de mettre les pieds sous la table pour un petit repas de nourriture bien terrestre, de trouver une laverie, etc., bref, de remettre les pieds sur terre.
A huit heures trente, je contacte les autorités pour les prévenir de notre arrivée imminente, et à neuf heures, l'ancre est jetée juste au bord du tombant de la barrière de corail, au Sud Ouest de Uligamu. Cette île est réputée dans le millieu des tour-du-mondistes pour la simplicité de ses formalités. Ici, pas besoin de visa comme ailleurs aux Maldives, juste une autorisation de débarquer (un shore-pass) pour une participation forfaitaire de 3 dollars américains par jour. De plus, à la différence des autres îles de l'archipel qui sont soumises à l'une des charias les plus dures du monde musulman, la tolérance est ici de mise. Ce régime très particulier accordée à cette île très excentrée des Maldives lui permet d'avoir la visite des nombreux voiliers de grande croisière, et de faire des affaires avec leurs équipages. Pourtant, nous sommes seuls. Pas un autre voilier, alors que cette île est réputée comme une escale formidable. Bizarre !
Contents d'être arrivés à ce petit coin de paradis, nous nous préparons à accueillir sur Sabay Dii, les représentants de la douane, de l'immigration, des services sanitaires, etc. qui devraient venir au bateau pour les formalités, d'un instant à l'autre.
A neuf heures trente, ils arrivent tout souriants.
Salutations chaleureuses, message de bienvenue. Ils s'installent dans le cockpit, et sortent de leurs porte-documents et cartables plein de formulaires à compléter.
Première question du formulaire : avez-vous souscrit, préalablement à votre arrivée, un contrat avec l'agent d'immigration. Je ne comprends pas la question et leur demande des explications, mais leur anglais est très approximatif. Je me fais répéter la question, puis leur réponds que non. Je n'ai contacté personne avant notre arrivée, conformément à ce que j'avais pu lire dans tous les guides de navigation traitant de la région. Ils me demande de voir ces guides et leur montre la dernière édition du Red Sea Pilot qui date de 2010. Je leur dis aussi que j'ai lu les mêmes informations sur les sites les mieux documentés, comme Noonsite.com.
Les sourcils se froncent un peu ... Tergiversations en langue locale, puis le responsable de la navigation nous annonce qu'il va falloir payer 69 USD pour la visite des douanes aujourd'hui, et la même somme lors de notre départ, mais nous n'aurons pas pour autant le droit de descendre à terre, car pour cela nous avons besoin de prendre un agent qui va s'occuper des autres formalités, moyennant finance, évidemment.
A l'évidence, tous ces fonctionnaires se sentent gênés devant notre incompréhension, et s'excusent en disant que les "règles" viennent de changer et que le gouvernement central imposent de nouvelles contraintes dont ils sont désolés. Pour ne pas nous décourager, ils me mettent en contact téléphonique avec l'agent local qui m'explique LA NOUVELLE RÈGLE ...
Soit on se débrouille par nous même, et cela va nous coûter très cher, et demander beaucoup de temps, car il faudra passer par les instances nationales avec visas et tout le tintouin, soit on passe par lui, seul agent agréé par le gouvernement central et il fera toutes les formalités à notre place moyennant 290 USD par personne pour une semaine sur l'île paradisiaque d'Uligamu.
Le petit problème est que nous n'avons pas l'intention de rester là une semaine, mais seulement un jour ou deux. Et le gros problème est que la NOUVELLE RÈGLE dit que c'est le même prix pour une heure, un jour ou une semaine à Uligamu.
580 dollars américains pour une journée, c'est un tarif d'américains.
Après une consultation de tout l'équipage d'un millionième de seconde, le Capitaine et son second annoncent en cœur que nos gentils hôtes viennent, avec leur NOUVELLE RÈGLE, de décourager deux merveilleux visiteurs pour leur chère île. En effet, notre intention de débarquer aux Maldives vient subitement et mystérieusement de s'évanouir. Grand et long silence !
Quelques mots de ma part pour leur faire comprendre à quel point cette NOUVELLE RÈGLE est contre-productive, la preuve en est qu'il n'y a aucun bateau à l'escale. Et de regretter pour la population locale que les devises qu'elle pouvait engranger leur passent sous le nez, au prétexte de vouloir remplir les caisses de l'état au dépend des plaisanciers, sans la moindre prestation de service. Et quelques mots de leur part pour nous dire à quel point ils regrettent que nous ne nous arrêtions pas.
Nous nous quittons souriants avec un message de félicité de notre part pour leur île et de leur part pour la suite de notre voyage.


















Paré en envoyer la grand-voile ?
Paré !
Envoyez !
A 11 heures, soit deux heures seulement après notre arrivée, nous quittons le mouillage désert d'Uligamu.
Quelques milles encore à traverser le paradisiaque archipel des Maldives, ...


et nous voilà dans la Mer d'Arabie, tant redoutée pour ses pirates. Ce sera la quatrième partie de notre long voyage sans escale, puisque notre option Maldives n'aura été qu'une déception sans débarquement.

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