Ayant été informés par Sébastien (mon correspondant de la
cellule Alindien-Marsec de sécurité maritime de la Marine Nationale) de la
présence du voilier français l’"Etoile" à Port Soudan, Bernard et moi avons pris
le bus pour aller saluer ces navigateurs qui ne nous étaient pas inconnus pour
deux raisons.
La gare routière de Suakin |
Les minibus sont tout-à-fait confortables. Et tout le monde est propre et bien habillé. Dans un pays sans eau !!! |
La première est que l’Etoile est le petit frère de Sabay
Dii, un RM1050 sorti presque en même temps du chantier Fora Marine de la
Rochelle d’où est aussi sorti Sabay Dii qui est un RM1200. Les RM, malgré leurs
qualités marines et leur réputation très flatteuse de Range Rover (fast
cruising boats) des mers ne sont pas légions. Il fallait aller saluer les RMistes.
Deuxième raison et non des moindres, cela faisait la nième
fois que nos routes autour du Monde se croisaient. D’abord en Polynésie, puis
aux Tonga, puis en Nouvelle Calédonie, … et enfin au Soudan.
En arrivant à Port Soudan, nous avons reconnu de loin la
belle carène vert pâle de l’"Etoile" dans le bassin du Port de commerce.
L'"Etoile" dans le bassin du port de commerce de Port Soudan |
Nous avons réussi à faire prévenir de notre présence l’équipage qui était à bord. Petite rencontre sympathique de deux équipages naviguant avec des voiliers semblables sur des routes quasiment identiques, depuis de nombreuses années.
Et ce n’était pas prêt de finir car, certainement à cause de la météo très particulière de la Mer Rouge, nous avions décidé de partir le même jour pour remonter vers le Nord et entrer en Egypte par Port Ghalib. L’équipage de l’Etoile semblant pressé de rejoindre cette destination avait prévu une navigation non-stop alors que de mon côté, j’avais prévu plusieurs étapes selon l’état de la mer et la force du vent.
Deux jours plus tard, nous prenions la mer depuis Port Suakin, et quelques heures plus tard l’"Etoile" remontait son ancre et quittait Port Soudan. Après deux jours de navigation, alors que nous avions choisi de nous arrêter à Marsa Inkefal pour nous reposer et éviter du vent fort annoncé par la météo, nous apercevions l’"Etoile" qui continuait sa route au large.
Deux jours plus tard, Sébastien de la cellule Alnidien-Marsec m’envoyait un message sur mon téléphone satellite pour m’annoncer que l’"Etoile" avait coulé après avoir heurté un récif, mais que l’équipage avait été récupéré in extremis par un bateau de pêche puis par une vedette de la Marine Égyptienne, et que tout le monde était sain et sauf.
Nous apprendrons une semaine plus tard en arrivant à Port Ghalib qu’un autre voilier français a coulé dans la Mer Rouge le mois précédent.
Eh oui ! La Mer Rouge est une mer vicieuse, avec, partout, des récifs très dangereux et non indiqués sur les cartes marines. En outre, le temps est souvent très mauvais, comme nous en avons fait l’expérience pendant les deux mois les plus favorables de l’année. Cette double caractéristique rend la navigation très risquée si l’on ne prend pas toutes les précautions d’usage dont la première est de n’être jamais pressé de rejoindre un point donné. En cas d’urgence, ou de fatigue, l’approche de toute côte est à éviter si l’on n’a pas de refuge avéré dont la route d’approche est saine quelle que soient les conditions météorologiques, ce qui est exceptionnellement rare en Mer Rouge. Comme dans tous les endroits à risque, Il faut donc être toujours prêt à partir, tout en étant capable de savoir attendre aussi longtemps que nécessaire les bonnes conditions, et tout en sachant s’arrêter avant les difficultés.
Les équipages des deux bateaux naufragés étaient très expérimentés et savaient cela aussi bien sinon mieux que moi, mais en Mer Rouge, la moindre erreur d’appréciation du temps, du risque ou la moindre erreur de navigation se paye très cher, d’autant que pour toutes ces raisons, aucune compagnie d’assurance n’assure les voiliers en Mer Rouge.
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