Bienvenu sur le site de Sabay Dii

En laotien, Sabay Dii signifie "bonjour", "salut", "ça va"...
Dans la pratique, cette expression est utilisée chaque fois qu'on est heureux de rencontrer quelqu'un.
Pas étonnant que j'ai baptisé mon bateau "Sabay Dii", non ?

jeudi 10 juin 2021

Marmaris métamorphosée

Je devais m'arrêter à Marmaris pour refaire quelques formalités obligatoires, dont le fameux "transit log", qui n'est autre qu'un droit de navigation se présentant sous la forme d'un gros fascicule que l'on doit payer chaque année, en plus d'avoir à verser une commission à un agent officiel (180 € cette année pour Sabay Dii). C'est le document à présenter chaque fois que l'on arrive dans une marina (elles sont obligées d'en enregistrer une copie), mais qui au départ était plutôt fait pour être visé par les autorités maritimes (Gardes-côtes essentiellement) pour vérifier que l'on ne fait pas illégalement du charter sans être déclaré en tant que skipper professionnel. Dans la réalité, c'est une façon de faire rentrer un peu d'argent dans les caisses vides de l'état, mais tous les pays ou presque font de même (droit annuel de navigation en France qui me coûte chaque année, le double alors que le bateau n'est pas dans les eaux territoriales).

Marmaris jouit d'une situation géographique absolument exceptionnelle.

En effet, comme on peut le voir sur la carte ci-dessus, la ville de Marmaris est située en bord de mer tout en restant totalement protégée des caprices méditerranéens par une île et une presqu'île qui délimitent avec la côte nord un bassin naturel toujours calme, même lorsque le vent souffle fort. Cette situation privilégiée associée au fait que les environs de Marmaris sont relativement peu escarpés, fait de cette ville le prototype de la station balnéaire : de belles plages bien ensoleillées et baignées d'une eau chaude et jamais agitée. Mais une telle situation fait en même temps de cette ville un port idéal. Les Perses ne s'étaient pas trompés en faisant de ce site appelé à l'époque Physcos, leur port-arsenal dès le IVe siècle av. J.-C.
Carte dessinée par Piri Reis, l'amiral de la flotte ottomane du XVIe siècle. A gauche la baie de Marmaris.

Les galères ont été depuis remplacées par une armada de "gület" (énormes bateaux de promenade en mer en bois massif construits en Turquie), par une concentration de super-yachts de luxe, à voile mais surtout à moteur, dont les propriétaires fortunés aiment à se retrouver, et surtout par plusieurs milliers de voiliers dont la grande majorité appartient à des sociétés de location (avec ou sans skipper).
Du coup, Marmaris est devenue une ville doublement spécialisée :
  • d'une part, on y trouve quelques rues occupées exclusivement par des magasins d'accastillage, des voileries, des ateliers de réparations nautiques. C'est LE PÔLE NAUTISME de la partie orientale de la Méditerranée.
  • d'autre part, la plage étant synonyme de vacances, les vacances pouvant devenir synonyme de festivités, et les festivités pouvant à leur tour dégénérer en agitation frénétique, Marmaris est devenu LE PÔLE FESTIF de la Turquie.

Si quelques milliers de personnes viennent à Marmaris pour faire de la voile, ils sont cent fois plus nombreux à venir y faire la fête, de toute l'Europe, mais aussi et surtout de Russie.

Dans la journée, le bazar mais aussi toutes les rues du centre-ville grouillent de monde, avec des rabatteurs pour vous faire acheter des tee-shirts Nike ou Adidas made in Turkey, des tapis faits-main dans les grosses usines automatisées d'Izmir, ou pour embarquer pour une croisière inoubliable en amoureux sur des "gület" entassant 500 personnes sur un pseudo-bateau pirate équipé d'une sono de 3000 watts. Comme tout est bon marché du fait de la dégringolade de la monnaie turque (- 50 % en deux ans, et en ce moment - 4 % par mois), il règne ici une frénésie consumériste assez effarante.

Et la nuit, la vie continue, mais en boîte de nuit. D'où un vacarme assourdissant de basses jusque vers 3 h du matin qui s'entendent à des kilomètres à la ronde.

Bref, Marmaris est l'exemple-type de ce qui se fait de pire, en terme de tourisme raisonnable. Et mon passage dans cette ville pourtant charmante, il y a deux ans, avec Sabay Dii, m'avait vraiment abasourdi le jour et assourdi la nuit.

J'y revenais cette année pour refaire mon transit log, et me demandais combien de temps j'arriverais à supporter cette ambiance fébrile et excitée.

Eh, oh surprise, en cette année très particulière de pandémie, j'ai découvert une autre ville. Marmaris métamorphosée par la virus de la COVID. Un effet secondaire imprévu, mais bienfaisant pour une fois. Finies toutes les nuisances du tourisme de masse débridé. Les restaurants et bars étant fermés ainsi que les commerces "non-essentiels", les touristes étant absents, les rabatteurs au chômage se sont remis à boire le thé, assis sur leur petits tabourets, en discutant football ou de la crise, et les 30 000 habitants de Marmaris (d'habitude envahis par dix à quinze fois plus de touristes) en ont profité pour se réapproprier leur charmant centre-ville et leur longue et belle Riviera.

C'est donc avec un plaisir nouveau que j'ai arpenté la ville pour faire mes démarches administratives, mais surtout, pour y faire mon marché, déguster un döner kebab ou une dondürma (la glace turque), ou discuter avec quelques personnes enfin tranquilles.
Pour ceux qui ont connu Marmaris en période estivale et qui ne me croiraient pas, voici la preuve par l'image que je ne raconte pas des "salades".
Le petit port des bateaux locaux (surtout des pêcheurs)


L'allée des superyachts
La rue des "gargottes"

L'une des allées couvertes du Bazar

Deux jeunes touristes venus à vélo à Marmaris, et qui, figés par la pandémie, ont pris un coup de vieux..


Vous l'aurez constaté, il n'y a personne dans les rues, les terrasses sont vides et même les allées couvertes du souk sont désertes. Et toute les quartiers de la ville habituellement bondés sont ainsi.

La promenade côtière


Ata Turc se demande où sont passés les touristes qui viennent habituellement le saluer.
Le boulevard qui mène aux plages
La principale plage, en pleine ville
Par contre, les marinas sont toujours pleine de bateaux, mais des bateaux vides, des loueurs désœuvrés, des pontons déserts 
Netsel Marina est LA grande marina du centre-ville, celle des loueurs de voiliers.
L'un des innombrables quais de cette marina


Un quai réservé à une enseigne de charters (qui lavent les voiles en attendant les clients)
La darse habituellement en service non -stop tout au long de la journée

Il y a toujours quelques splendides bateaux à Marmaris

Quelques jolis bateaux de régates aussi (Un A35)

 
Pratiquement aucun bateau de voyage (même en transit)
Et puis, il y a ce catamaran, le seul que j'ai vu avec une annexe à la voile (un F14) et pas un zodiac motorisé.

 
Un F14 de chez Bénéteau, voilà une bonne idée. Petit, léger, facile à tansporter, et en plus vivant, stable et rapide, dont facile à faire marcher ; tout pour me plaire. Ce pourrait bien être mon prochain bateau lorsque j'arrêterai de bourlinguer. Mais pour le moment, je n'en parle à personne, et surtout pas à Sabay Dii. Evidemment !


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