Etape 1 : de Phuket aux Îles Similan
Pour rejoindre l’archipel indien des Andaman, Sabay Dii, qui était mouillé sur la côte ouest de Phuket, avait à parcourir environ 450 milles nautiques (800 km) pour rejoindre Port Blair, le seul port d’entrée officiel de l’archipel des Andamans.
La météo n’était pas fameuse, avec un vent dominant très faible (entre force 0 et force 2) pendant pratiquement toute la semaine où j’avais prévu de naviguer, et en plus de secteur Nord ou même Nord-Ouest, ce qui veut dire, tirer des bords face au « vent », et multiplier du coup par 1,5 la distance à parcourir. Avec une vitesse des 2 nœuds, cela promettait plus d’une dizaine de jours de navigation très lente et ennuyeuse.
Mais depuis tout le temps que je mène ma carène sur les eaux de ce coin du monde, j’ai pris l’habitude de ne tenir compte des fichiers météo (grib US) que lorsqu’ils m’annoncent du fort vent. Et une fois de plus, j’ai bien fait, car, comme vous allez le constater, Sabay Dii n’a pas moisi sur ce parcours annoncé a priori comme l’un des plus lents de sa carrière.
Départ le mercredi 14 février à 11 heures pétantes, après avoir fait le plein de frais pour 10 jours.
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Micro-aubergines et maxi-haricots verts |
Et quel festin en perspective ! Du canard laqué, du jarret de porc dans son bouillon, des crevettes, et toutes sortes de légumes (carottes, tomates cerises, aubergines naines, choux rouge, petzail, haricots kilomètres, petits oignons et aulx miniatures mais combien parfumés, cébettes …), d’herbes et épices fraîches (coriandre, menthe, basilic rouge, feuilles et fruits de combava, tiges de citronnelle, racines de curcuma et gingembre, galanga, …) et de fruits (pomme, banane, papaye, ananas, mangue, fruit du dragon, mangoustan, tangerine, pastèque, pamplemousse géant de Bornéo, citron vert, sapotille, …), sans oublier deux variétés de champignons frais, des pâtes fraîches de riz et de blé, et bien sûr, un stock des délicieux yaourts thaïlandais à la noix de coco.
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Les micro-aubergines crues, du croustillant dans une salade |
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La couleur, mais ni l’odeur ni le goût.
On ne peut pas tout faire passer par les tuyaux de l’informatique |
Mais pourquoi attendre 11 heures pour partir, quand la route semble si longue ? Eh bien pour deux raisons.
1. cela me permettait d’aller acheter au marché les produits les plus frais possibles ;
2. en temporisant, je pouvais espérer une brise côtière qui ne peut se lever qu’avec un soleil assez haut. Et effectivement, le vent fut de la partie dès le milieu de la journée, pour ce début de parcours. Pas la tempête certes, mais une brise constante de 10 nœuds oscillante, et bien sûr de secteur Nord-Ouest, puisque le vent synoptique était de Nord et la composante thermique d’Ouest. Mais Sabay Dii marche du feu de dieu au près, et tirer des bords à trente degrés du vent apparent (et même moins par mer plate, comme c’était le cas) ne lui fait pas peur.
Dans d‘aussi bonnes conditions, Sabay Dii avait parcouru, en
milieu de nuit, plus de 60 milles, ce qui me permettait de mettre le cap sur
les îles Similan, alors que j’aurais pu profiter du vent qui était passé secteur
Nord, pour gagner facilement des milles vers ma destination finale. Mais ce
détour plein Ouest m’arrangeait, car derrière, à l’Est, le ciel était zébré en
permanence d’éclairs (un toute les secondes pendant plus d’une heure).
A 4 heures du matin, Sabay Dii était amarré à un corps-mort de Ko Bangu, et je dormais comme un loir, avec le capot de ma cabine ouvert sous un ciel magnifiquement étoilé, à la verticale de la constellation d’Orion. Par contre, je n’avais aucun idée de ce que me réserverait, au petit jour, ce mouillage opportun (mais pas imprévu, car en bateau, on doit toujours avoir un plan B, un C et parfois un D), car la nuit était d’encre, et ma recherche d’un corps-mort s’était faite à la torche et aux instruments de navigation électronique.
Une fois le ventre plein, petit plouf pour aller vérifier
l’état du corps mort (j’ai déjà eu deux mauvaises expériences de corps-morts en
train de se rompre, l’an dernier, en Thaïlande). Et quelle nouvelle
surprise ! Des poissons partout, et de taille inhabituelle, se déplaçant
paisiblement sous mon nez, sans la moindre crainte, dans une eau à la
transparence absolue.
Il ne m’en fallait pas plus pour me décider à attendre
sagement ici, que le vent se levât.
Chaussé de mes palmes, masque et tuba, et de mon petit
appareil photo étanche, je partais explorer les environs.
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Les poissons accorent pour venir brouter les quilles de Sabay Dii |
Deux heures plus tard, les charters arrivaient de toutes parts pour déverser autour de moi leurs cargaisons bruyantes d’hommes- crapauds et de femmes- grenouilles, affublés de gros gilets de sauvetage fluorescents, et donc tout-à-fait adaptés au milieu marin pour faire fuir la faune locale la moins effarouchable. Comme pour la plupart des poissons, c’en était trop pour moi.
Je regagnais Sabay Dii et quittais le corps-mort pour en trouver un autre, parfaitement calme, à moins de 500 mètres du premier, dans une joli petite crique avec plage particulière, et où j’allais rester deux jours paradisiaques, en attendant qu’Eole me fasse un clin d’œil.
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Le deuxième mouillage |
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