A quelques jours de mon départ pour plusieurs mois de navigation sur Sabay Dii, il est temps de faire le bilan de mon "passage sur Terre". Bilan environnemental, évidemment, puisqu'il s'agit du troisième et dernier volet de mon sujet sur la sobriété, avec encore les trois points primordiaux :
- le bilan énergétique
- le bilan de la consommation d'eau
- et la consommation et le retraitement des biens de consommation
- L'énergie
Dès mon arrivée en France, j'ai remplacé toutes les lampes de mon logis qui n'étaient pas "très basse consommation", et j'ai commandé le remplacement de toutes les fenêtres de l'appartement qui n'étaient pas performantes du point de vue isolation thermique. J'ai surtout continué à vivre comme sur le bateau, c'est-à-dire en ne laissant allumée que la pièce où je vivais, et en ne laissant jamais fonctionner inutilement un appareil électrique. Comme par ailleurs je n'utilise pas les gadgets électriques qui pullulent aujourd'hui, à l'exception d'un mixeur pour faire de la soupe de légume, un ordinateur portable et mon téléphone, il n'est pas étonnant que ma consommation d'énergie ne soit pas dans la norme proposée par mon fournisseur qui a du réviser ses prévisions et me rembourser plus de 80% de ce qu'il avait imaginé (en tenant pourtant compte du fait que je vis seul).
Ce faisant, j'arrive au bilan mensuel moyen suivant :
- Moins de 50 kWh par mois pour l'électricité,
- Moins de 30 kWh par mois pour le gaz.
Pour ce qui est de l'électricité, j'ai bien un téléviseur, mais il n'a fonctionné que 4 heures depuis septembre, quant à l'aspirateur, son temps d'utilisation est bien sûr très limité. La consommation provient presque exclusivement de la machine à laver le linge et surtout de mon petit frigo de 150 L que je changerai l'an prochain (j'ai renoncé à utiliser le petit congélateur de 100 L qui est dans l'appartement). Ainsi, je pense pouvoir descendre en dessous de 30 kWh par mois, ce qui pourrait être fourni par deux panneaux solaires sur mon balcon, mais malheureusement cela est interdit par le règlement de copropriété.
Pour ce qui est du gaz, il faut savoir que mon appartement est très vieux et prévu pour un fonctionnement prioritaire au gaz de ville (eau chaude aux robinets, cuisinière à gaz et chauffage central au gaz). C'est donc, en théorie, le poste budgétaire le plus élevé, et pourtant il apparaît que je consomme encore moins de gaz que d'électricité. A cela plusieurs raisons. La première est mon alimentation (céréales froides et fruits au petit déjeuner, salades à midi et un repas chaud le soir, comme sur le bateau). Quant à la toilette, encore et toujours, j'arrive à fonctionner sans problème comme sur le bateau, même si de temps en temps je me paye le luxe d'une douche ultrarapide chaude. C'est donc en partie la production d'eau chaude pour la vaisselle et le ménage qui est responsable de ma note de gaz. Vous allez me dire que j'oublie le chauffage. Eh bien non, car je n'ai pas eu à allumer la partie chauffage de la chaudière, bien que la température ne soit jamais descendue en dessous de 19°C dans l'appartement. C'est tout à fait compréhensible quand on sait que toutes les fenêtres (7 grandes baies vitrées doubles) sont orientées vers le Sud, qu'il ne fait jamais bien froid à Perpignan (surtout cette année) et que je ne laisse jamais mon appartement sans tous les volets ouverts de jour et fermés de nuit.
- L'eau
Pour ce qui est de l'eau, j'ai gardé mes bonnes vieilles habitudes de marin, et les seules différences sont que j'ai une machine à laver le linge, et des wc qui ne fonctionnent pas à l'eau de mer. Bien évidemment, je ne me lave pas à l'eau de mer non plus, mais malgré cela, j'arrive sans la moindre restriction à consommer moins de 500 L par mois (dont 100 L de boisson), en appliquant mes règles de sobriété marines. Cela pourrait vous paraître très peu, mais pourtant, c'est 6 fois plus que ce que je consomme en mer.
- Les biens de consommation
Mes achats de biens de consommation sont limités à la nourriture que je n'achète que dans des épiceries locales et au marché. Donc pratiquement pas d'emballage. Du coup, j'arrive à produire moins de 3L de déchets organiques par semaine (épluchures de légumes et de fruits) et moins de 15 L par mois de déchets recyclables (papier, verre, et un tout petit peu de plastique).
Enfin, il reste un poste de dépense que je n'ai pas lorsque je suis en mer, celui des déplacements que j'ai limité aux visites hebdomadaires à ma mère (une fois par semaine) et à trois autres déplacements pour passer des vacances en famille. A l'exception de deux voyages de vacances, tous mes trajets ont été fait sous le régime du covoiturage. Quant aux déplacements quotidiens, c'est à pied ou à vélo que je me bouge, dans la mesure où je n'ai pas une trop lourde charge à transporter.
Moralité : la vie en mer m'a appris à vivre avec sobriété, et c'est donc sans aucune difficulté que je passe d'un milieu à l'autre avec les même règles de fonctionnement, simples, économes. Mais lorsque je reviens à terre pour un bon bout de temps, j'ai l'impression d'être immergé dans un monde de consommation effrénée, un monde de gadgets, de plaisirs compliqués et futiles, d'excitation maladive, d'urgence permanente favorisant mouvement et consommation, et donc un monde de gaspillage de richesse, d'énergie, mais aussi un monde sans pause, dépourvu de contemplation, d'émotions simples et profondes, un monde ou l'usage des objets prime sur la perception volontaire, consciente et raisonné du temps et de l'espace, comme cela se passe en pleine mer. D'où la question existentielle de ma place sur notre belle planète, dans le futur.
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