Bienvenu sur le site de Sabay Dii

En laotien, Sabay Dii signifie "bonjour", "salut", "ça va"...
Dans la pratique, cette expression est utilisée chaque fois qu'on est heureux de rencontrer quelqu'un.
Pas étonnant que j'ai baptisé mon bateau "Sabay Dii", non ?

jeudi 22 février 2018

En route vers les Andamans 2

Etape 2 ; des Îles Similan à Port Blair

Pour cette deuxième étape de 380 milles nautiques, la météo était toujours aussi pessimiste, avec très peu de vent annoncé, mais bon … 

Départ de Ko Bangu le samedi 17 février à 8 heures du matin, avec un gentil vent de 10 nœuds soufflant du NNE sur une mer plate, ce qui fait frémir de joie la carène de Sabay Dii.
Les Similan dans le rétroviseur
Mais cela ne durera pas longtemps, car la pétole arrive sournoisement. Pourtant, avec 5 nœuds de vent seulement, le bateau avance à 3/4 nœuds grâce à un petit courant favorable. A cette allure, je table sur quatre jours de navigation et une arrivée à Port Blair le 21 au petit jour. 
La journée se passe donc tranquillement. Pas grand-chose à faire si ce n’est à me préparer des petits plats et à surveiller ma canne à pêche. Pourtant, je vais assister à un drôle de phénomène. En pleine mer, loin de tout, Sabay Dii se retrouve d’un coup au milieu d’un véritable torrent, alors que tout autour, tout est calme. Les vagues sont violentes et complètement désordonnées. On se croirait dans le mascaret d’une passe des Tuamotu ou de Nouvelle Calédonie. Le bateau est cogné de toutes parts. Quelques minutes plus tard, le torrent est franchi et on se retrouve sur une mer plate. Très étonnant ! 
Ce phénomène se reproduira de nombreuses fois par jour jusqu’à l’arrivée à Port Blair. Il est connu et détaillé dans les Instructions Nautiques de la Mer d’Andaman, mais je n’en ai trouvé aucune explication, si ce n’est le relief sous-marin et l’activité tellurique de toute cette zone. J’aurai un jour la bonne réponse … 
La nuit se passera aussi sans problème, avec très peu de trafic : uniquement de gros cargos faciles à repérer qui quittent le détroit de Malacca pour rejoindre l’Inde ou la Mer Rouge, et plus ces redoutables bateaux de pêche sans signalisation qui pullulent du côté de la Thaïlande, la Malaisie ou l’Indonésie. D’où une belle nuit de sommeil entrecoupée d’un court réveil toutes les heures pour jeter un coup d’œil au radar ou à l’AIS.
Oh les belles pinces à linge 
Mais non, idiot, c'est le cargo qu'il faut surveiller !
Le lendemain, même temps, sauf qu’en fin d’après-midi le vent tourne au NE et s’établit à 8/10 nœuds. Des conditions idéales. Sabay Dii s’emballe, et file à belle vitesse droit vers les Andamans. A cette allure, je devrais arriver dans la nuit du 19 au 20, alors que je n’ai le droit d’arriver que le 20 après 8 heures. Il va falloir que je mette « les pieds dans l’eau » pour freiner mon destrier qui piaffe de plaisir dans ce près bon plein.
Andaman en vue
Port Blair
Et effectivement, en « levant le pied » sur la fin, Sabay Dii entre dans la superbe baie de Port Blair, après moins de trois jours et trois nuits de navigation plaisante, avec un capitaine frais comme un gardon qui aura bien mangé et bien dormi, mais qui, une fois de plus, n’aura pas vu la moindre trace d’oiseau marin ni de poisson. A désespérer de l’état de notre nature !

Les poissons de Ko Bangu

Des poissons de toutes les couleurs, en veux-tu, en voilà ...
Une carangue se faufile au milieu des poissons qu'elle mangera peut-être un jour
Poisson perroquet en train de dévorer du corail
Un nazon

Des sergents-majors
Un baliste
Belle tête ce nazon

En route vers les Andamans 1

Etape 1 : de Phuket aux Îles Similan

Pour rejoindre l’archipel indien des Andaman, Sabay Dii, qui était mouillé sur la côte ouest de Phuket, avait à parcourir environ 450 milles nautiques (800 km) pour rejoindre Port Blair, le seul port d’entrée officiel de l’archipel des Andamans.
La météo n’était pas fameuse, avec un vent dominant très faible (entre force 0 et force 2) pendant pratiquement toute la semaine où j’avais prévu de naviguer, et en plus de secteur Nord ou même Nord-Ouest, ce qui veut dire, tirer des bords face au « vent », et multiplier du coup par 1,5 la distance à parcourir. Avec une vitesse des 2 nœuds, cela promettait plus d’une dizaine de jours de navigation très lente et ennuyeuse.
Mais depuis tout le temps que je mène ma carène sur les eaux de ce coin du monde, j’ai pris l’habitude de ne tenir compte des fichiers météo (grib US) que lorsqu’ils m’annoncent du fort vent. Et une fois de plus, j’ai bien fait, car, comme vous allez le constater, Sabay Dii n’a pas moisi sur ce parcours annoncé a priori comme l’un des plus lents de sa carrière. 

Départ le mercredi 14 février à 11 heures pétantes, après avoir fait le plein de frais pour 10 jours.
Micro-aubergines et maxi-haricots verts

Et quel festin en perspective ! Du canard laqué, du jarret de porc dans son bouillon, des crevettes, et toutes sortes de légumes (carottes, tomates cerises, aubergines naines, choux rouge, petzail, haricots kilomètres, petits oignons et aulx miniatures mais combien parfumés, cébettes …), d’herbes et épices fraîches (coriandre, menthe, basilic rouge, feuilles et fruits de combava, tiges de citronnelle, racines de curcuma et gingembre, galanga, …) et de fruits (pomme, banane, papaye, ananas, mangue, fruit du dragon, mangoustan, tangerine, pastèque, pamplemousse géant de Bornéo, citron vert, sapotille, …), sans oublier deux variétés de champignons frais, des pâtes fraîches de riz et de blé, et bien sûr, un stock des délicieux yaourts thaïlandais à la noix de coco.
Les micro-aubergines crues, du croustillant dans une salade
La couleur, mais ni l’odeur ni le goût.
On ne peut pas tout faire passer par les tuyaux de l’informatique






















Mais pourquoi attendre 11 heures pour partir, quand la route semble si longue ? Eh bien pour deux raisons. 
1. cela me permettait d’aller acheter au marché les produits les plus frais possibles ; 
2. en temporisant, je pouvais espérer une brise côtière qui ne peut se lever qu’avec un soleil assez haut. Et effectivement, le vent fut de la partie dès le milieu de la journée, pour ce début de parcours. Pas la tempête certes, mais une brise constante de 10 nœuds oscillante, et bien sûr de secteur Nord-Ouest, puisque le vent synoptique était de Nord et la composante thermique d’Ouest. Mais Sabay Dii marche du feu de dieu au près, et tirer des bords à trente degrés du vent apparent (et même moins par mer plate, comme c’était le cas) ne lui fait pas peur.
Dans d‘aussi bonnes conditions, Sabay Dii avait parcouru, en milieu de nuit, plus de 60 milles, ce qui me permettait de mettre le cap sur les îles Similan, alors que j’aurais pu profiter du vent qui était passé secteur Nord, pour gagner facilement des milles vers ma destination finale. Mais ce détour plein Ouest m’arrangeait, car derrière, à l’Est, le ciel était zébré en permanence d’éclairs (un toute les secondes pendant plus d’une heure).
A 4 heures du matin, Sabay Dii était amarré à un corps-mort de Ko Bangu, et je dormais comme un loir, avec le capot de ma cabine ouvert sous un ciel magnifiquement étoilé, à la verticale de la constellation d’Orion. Par contre, je n’avais aucun idée de ce que me réserverait, au petit jour, ce mouillage opportun (mais pas imprévu, car en bateau, on doit toujours avoir un plan B, un C et parfois un D), car la nuit était d’encre, et ma recherche d’un corps-mort s’était faite à la torche et aux instruments de navigation électronique.


Et à 9 heures, quel réveil !
Ça ne paye pas de mine avec le temps couvert mais attendez que le soleil se lève ...
Ma plage privée m'attend


C'est par ce passage que je suis rentré par une nuit d'encre pour trouver ce mouilage
Avant la pluie
Après la pluie

Une petite averse pour la douche du Capitaine et rincer le bateau et le ciel, puis place au soleil 
Pas de vis-à-vis. Rien pour couvrir le doux chuchotement du clapotis de l’eau sur la coque de Sabay Dii et contre les énormes « boulders » (blocs de granit) de cette île miniature située à l’extrémité Nord du Parc Naturel Marin Thaïlandais des Similans. L’endroit idéal pour se baigner après un bon petit déjeuner en terrasse (céréales au lait de soja et la première salade de fruits de la croisière).
Des copains australiens sur leur gros bateau à moteur Restless M.
Nous croisons nos étrave depuis l’Indonésie en 2016

Une fois le ventre plein, petit plouf pour aller vérifier l’état du corps mort (j’ai déjà eu deux mauvaises expériences de corps-morts en train de se rompre, l’an dernier, en Thaïlande). Et quelle nouvelle surprise ! Des poissons partout, et de taille inhabituelle, se déplaçant paisiblement sous mon nez, sans la moindre crainte, dans une eau à la transparence absolue.
Il ne m’en fallait pas plus pour me décider à attendre sagement ici, que le vent se levât.
Chaussé de mes palmes, masque et tuba, et de mon petit appareil photo étanche, je partais explorer les environs.
Les poissons accorent pour venir brouter les quilles de Sabay Dii
Deux heures plus tard, les charters arrivaient de toutes parts pour déverser autour de moi leurs cargaisons bruyantes d’hommes- crapauds et de femmes- grenouilles, affublés de gros gilets de sauvetage fluorescents, et donc tout-à-fait adaptés au milieu marin pour faire fuir la faune locale la moins effarouchable. Comme pour la plupart des poissons, c’en était trop pour moi.
Je regagnais Sabay Dii et quittais le corps-mort pour en trouver un autre, parfaitement calme, à moins de 500 mètres du premier, dans une joli petite crique avec plage particulière, et où j’allais rester deux jours paradisiaques, en attendant qu’Eole me fasse un clin d’œil.

Le deuxième mouillage